Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège

Date
26/11/2003
Qualification(s) disciplinaire(s)
Manquement au devoir de probité (devoir de respecter les exigences des bonnes mœurs), Manquement au devoir de probité (obligation de préserver la dignité de sa charge), Manquement au devoir de probité (devoir de préserver l’honneur de la justice), Manquement au devoir de probité (devoir de maintenir la confiance du justiciable envers l’institution judiciaire)
Décision
Interdiction temporaire de l'exercice des fonctions
Mots-clés
Mise en examen
Exhibition sexuelle
Masturbation
Etat psychiatrique
Arrêt maladie
Image de la justice
Probité
Bonnes mœurs
Dignité
Honneur
Institution judiciaire (confiance)
Interdiction temporaire de l'exercice des fonctions
Juge
Fonction
Juge au tribunal de grande instance
Résumé
Mise en examen d’un magistrat du chef d’exhibition sexuelle pour s’être livré à des actes de masturbation au cours d’une audience du tribunal correctionnel à laquelle il siégeait en qualité d’assesseur
Décision(s) associée(s)

Le Conseil supérieur de la magistrature réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège et siégeant à la Cour de cassation le 25 novembre 2003 ;

Vu l’article 50 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, modifiée par la loi organique n° 92-189 du 25 février 1992 ;

Vu la dépêche du garde des sceaux, ministre de la justice, du 3 novembre 2003, proposant au Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège, d’interdire temporairement l’exercice de ses fonctions à M. X, juge au tribunal de grande instance de V ;

Vu les avis du premier président de la cour d’appel de W du 16 octobre 2003 et du président du tribunal de grande instance de V de la même date ;

Vu les pièces d’où il résulte que M. X a pris connaissance de l’acte de saisine du Conseil supérieur de la magistrature par le garde des sceaux et de sa convocation devant cette instance ;

Après avoir entendu M. Patrice Davost, directeur des services judiciaires, assisté de Mme Martine Imberton-Varache et de Mme Florence Butin, magistrates à l’administration centrale du ministère de la justice, le 25 novembre 2003, à 15 heures ;

Attendu qu’aux termes de l’article 50 de l’ordonnance du 22 décembre 1958, le garde des sceaux, ministre de la justice, peut, s’il y a urgence et après avis des chefs hiérarchiques, proposer au Conseil supérieur de la magistrature d’interdire au magistrat du siège faisant l’objet d’une enquête l’exercice de ses fonctions jusqu’à décision définitive sur les poursuites disciplinaires ; que l’interdiction temporaire, prise dans l’intérêt du service, ne peut être rendue publique ;

Attendu qu’il résulte des documents soumis au Conseil que, le 15 octobre 2003, plusieurs témoins ont vu M. X se livrer à des actes de masturbation au cours d’une audience du tribunal correctionnel de V où il siégeait en qualité d’assesseur ; qu’à la suite de l’enquête immédiatement ordonnée, il a, le 16 octobre, été mis en examen pour l’infraction d’exhibition sexuelle par le juge d’instruction de V qui l’a placé sous contrôle judiciaire par une ordonnance lui interdisant de se rendre dans le département de Y et d’exercer les fonctions de magistrat ;

Attendu que M. X qui, depuis 1996, a bénéficié de congés de longue maladie successifs a, en dernier lieu, été autorisé à reprendre ses activités à mi-temps « thérapeutique » à partir du 18 septembre 2003 ; que l’examen psychiatrique auquel il a été soumis le 16 octobre 2003 révèle qu’au moment des faits, il était atteint d’un trouble psychique ayant altéré son discernement sans l’abolir ;

Attendu qu’aux termes d’un certificat établi le 20 novembre 2003 par un chef de service du centre hospitalier de ..., M. X est hospitalisé dans cet établissement depuis le 19 octobre 2003, « son état clinique est totalement incompatible avec sa comparution devant le Conseil supérieur de la magistrature » et « son état psychopathologique contre-indique totalement toute activité professionnelle et ce, de façon définitive » ;

Attendu que le comportement exhibitionniste imputé à l’intéressé dans l’exercice de ses fonctions et visé par l’enquête pénale dont il fait l’objet caractérise tout à la fois l’urgence et l’intérêt du service justifiant la mesure d’interdiction proposée par le ministre de la justice conformément à l’avis exprimé par le président du tribunal de grande instance de V et le premier président de la cour d’appel de W ;

Par ces motifs,

Interdit temporairement à M. X l’exercice de ses fonctions, de juge au tribunal de grande instance de V jusqu’à ce qu’intervienne une décision définitive sur les poursuites disciplinaires ;

Dit que cette interdiction cessera de plein droit de produire ses effets si, à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, le garde des sceaux n’a pas saisi le Conseil supérieur de la magistrature dans les conditions prévues à l’article 50-1 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 relative au statut de la magistrature ;

Dit que copie de la présente décision sera adressée au premier président de la cour d’appel de W.