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L’histoire du Conseil Supérieur de la Magistrature

Depuis sa création, le Conseil supérieur de la magistrature est engagé dans un processus continu d’émancipation et d’autonomisation, à la recherche de sa juste place entre le législatif, l’exécutif et le judiciaire.

L’histoire constitutionnelle de la magistrature depuis 1958 est celle d’une longue marche faite de petits pas vers davantage d’indépendance

Bertrand LOUVEL

Premier président de la Cour de cassation de 2014 à 2019, lors d’un discours aux élèves magistrats en 2015.

L'évolution du Conseil supérieur de la magistrature

1883

La loi du 30 août 1883 sur la réforme de l’organisation judiciaire consacre l’apparition du Conseil supérieur de la magistrature, qui désigne alors la Cour de cassation, statuant toutes chambres réunies, pour connaître de la discipline des juges.

1946

La Constitution du 27 octobre 1946 en fait un organe constitutionnel autonome. 

Le Conseil supérieur de la magistrature est consacré dans la Constitution de la 4ème République, qui marque la volonté de fonder une justice indépendante, dans un contexte marqué par le serment de fidélité prêté par les magistrats au Maréchal Pétain dans le cadre du régime de Vichy. 

Le Conseil est alors présidé par le Président de la République, le garde des sceaux étant son vice-président. II est composé de six membres élus par l’Assemblée nationale, quatre magistrats élus par leurs pairs et deux membres désignés, au sein des professions judiciaires, par le Président de la République. 

Les compétences du Conseil sont élargies à la nomination des magistrats du siège, pour lesquels il dispose du pouvoir de proposition. 

Composition CSM 1946 à 1958
1958

La Constitution du 4 octobre 1958 réforme l'institution. 
Sa composition est modifiée autour du Président de la République et du garde des sceaux, qui restent respectivement président et vice-président. 
Les neuf membres sont désignés par le chef de l'État, soit directement (deux personnalités qualifiées), soit sur proposition du bureau de la Cour de cassation (six magistrats) ou de l'assemblée générale du Conseil d'État (un conseiller d'Etat). Cette composition, relevant exclusivement du pouvoir exécutif, répond à la volonté du Général de Gaulle de limiter l’influence des partis sur la gestion du corps judiciaire.  
Les pouvoirs du Conseil sont limités, l'ancien Conseil ayant été dans l'incapacité d’exercer l’ensemble de ses prérogatives. II ne propose plus au Président de la République que la nomination des magistrats du siège de la Cour de cassation et des premiers présidents de cour d'appel. Il donne un avis simple sur le projet de nomination des autres magistrats du siège. 
Il est confirmé comme conseil de discipline des juges.
Le Conseil de 1958 ne dispose toujours d’aucune prérogative s’agissant des magistrats du parquet (procureurs), dont la gestion relève exclusivement du ministre de la Justice. 

Composition CSM 1958 à 1993
1993

Avec La loi constitutionnelle du 27 juillet, les six magistrats composant chacune des formations sont dorénavant élus : cinq magistrats du siège et un magistrat du parquet pour la formation compétente à l'égard des magistrats du siège, et cinq magistrats du parquet et un magistrat du siège pour la formation compétente à l'égard des magistrats du parquet. Ce système symbolise I'unité du corps judiciaire. 
Le Conseil est en outre composé de quatre membres communs aux deux formations, désignés par le Président de la République, les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat et par I’assemblée générale du Conseil d'État.
Ainsi, dans cette composition, les magistrats (6) sont à parité avec les membres non magistrats (6 incluant le président et vice-président) au sein de chaque formation. 
Les prérogatives du Conseil sont renforcées. 
S’agissant des nominations, son pouvoir de proposition est étendu aux présidents des tribunaux de grande instance (TGI) alors qu’il ne concernait auparavant que les magistrats du siège de la Cour de cassation et les premiers présidents de cour d'appel. Pour les autres magistrats du siège, un avis conforme est requis. En cas d'avis non-conforme, le ministre de la justice ne peut passer outre. 
Enfin, la formation du Conseil compétente à l'égard des magistrats du parquet se voit pour la première fois attribuer un pouvoir d'avis simple, favorable ou défavorable, pour toutes les nominations des magistrats du parquet, à l'exception de ceux dont les emplois sont pourvus en Conseil des ministres (procureur général prés Ia Cour de cassation et procureurs généraux prés les cours d’appel, soit les plus hauts postes de la hiérarchie du parquet).

Composition CSM 1993 à 2011
2001

La loi organique du 25 juin 2001 modifie le mode d'élection des magistrats autres que les membres de la Cour de cassation et les chefs de cour et de juridiction, de parquet général et de parquet, en adoptant le scrutin de liste à la représentation proportionnelle suivant la règle du plus fort reste, sans panachage ni vote préférentiel. Elle modifie en outre le mode de saisine et le mode de fonctionnement du Conseil statuant en formation disciplinaire.

2011

La réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008 et la loi organique promulguée le 22 juillet 2010 confèrent au Conseil une indépendance constitutionnelle, fonctionnelle et budgétaire complète. 

Le Conseil est désormais présidé par le premier président de la Cour de cassation s’agissant de la formation compétente à l’égard des magistrats du siège et par le procureur général près la Cour de cassation pour la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet. Ils sont respectivement président et président suppléant de la formation plénière 

Les membres non-magistrats (8) sont désormais majoritaires par rapport aux magistrats (7) au sein de chaque formation. Voir la composition actuelle du CSM.

Toutes les nominations de magistrats du parquet, y compris ceux pourvus auparavant en Conseil des ministres, sont dorénavant soumis à un avis simple du Conseil supérieur de la magistrature. En savoir plus sur les pouvoirs du CSM en matière de nomination

Tout justiciable qui estime qu’à l’occasion d’une procédure judiciaire le concernant le comportement adopté par un magistrat est susceptible de recevoir une qualification disciplinaire peut désormais saisir le Conseil supérieur de la magistrature d'une plainte.

Composition du Conseil depuis 2011
2027

La loi organique n°2023-1058 du 20 novembre 2023 relative à l'ouverture, à la modernisation et à la responsabilité du corps judiciaire a modifié le mode de scrutin des magistrats élus au CSM. 

Cette réforme a également prévu le renouvellement par moitié tous les deux ans des personnalités qualifiées. 

Ces changements interviendront au moment du prochain renouvellement des membres du CSM, prévu au début de l'année 2027. 

Les lieux du Conseil supérieur de la magistrature

Ces évolutions concernant la composition et les attributions du Conseil supérieur de la magistrature se retrouvent également dans les lieux où le Conseil a exercé ses missions depuis sa création :

Bibliographie

  • Auriol (Vincent), Journal d’un septennat, 1947-1954, Armand Colin, 1970.
  • Balandier (Michaël), Le Conseil supérieur de la magistrature — De la révision constitutionnelle du 27 juillet 1993 aux enjeux actuels, Tome I (Thèse Droit), Paris, Éditions Manuscrit Université, 2007, 428 p.
  • Balandier (Michaël), Le Conseil supérieur de la magistrature — De la révision constitutionnelle du 27 juillet 1993 aux enjeux actuels, Tome II (Thèse Droit), Paris, Éditions Manuscrit Université, 2007, 428 p.
  • Bloch (Etienne), "Le CSM de la Constitution de la IVème République", in Etre juge demain, Presses Universitaires de Lille, 1983.
  • Bonnet (Julien), "Le Conseil d'Etat et le Conseil supérieur de la magistrature", Revue du droit public, n°4, 2004
  • Commaille (Jacques), L'esprit sociologique des lois, PUF, 1994
  • De la Rocca (G), Le Conseil supérieur de la magistrature dans la Constitution de la République française du 27 octobre 1946, Thèse, Paris, 1949
  • Foyer (Jean,), Sur les chemins du droit, Mémoires de ma vie politique 1944-1988, Fayard, 2006
  • Ghaleh-Marzban (Peimane), La réforme du Conseil supérieur de la magistrature : vers de nouveaux équilibres, Les cahiers de la fonction publique, février 2011
  • Gicquel (Jean), Avril (Pierre), "Conseil supérieur de la magistrature" in Cadiet, Loic, (dir) Dictionnaire de la justice, PUF, 2004
  • Guarnieri (Carlo) et Pederzoli (Patrizia), La puissance de juger. Pouvoir judiciaire et démocratie, Michalon, 1996
  • Guyot (Anne-Laure), L'évolution des rapports de la justice judiciaire et du politique : l'exemple du Conseil supérieur de la magistrature, Grenoble, IEP, 1996
  • Le Pogam (Michel), Le Conseil supérieur de la magistrature - éditions Lexis Nexis, collection Institutions-droit et professionnels, paru en septembre 2014, préface de Nicolas Molfessis, professeur à Paris II Panthéon-Assas
  • Masson (Gérard), Les juges et le pouvoir, Moreau/Syros, 1977
  • Noque (Alain), Le Conseil supérieur de la magistrature, Université de Paris I, Thèse, 1985
  • Quermonne (Jean-Louis) et Chagnollaud (Dominique), Le gouvernement de la France sous la Vème République, Fayard, 1996
  • Renoux (Thierry) et de Villiers (Michel) Code constitutionnel, LITEC, 2005
  • Ricard (Thierry), Le Conseil supérieur de la magistrature, coll. « Que sais-je ? », PUF, 1990
  • Rosenvallon (Pierre), le Peuple introuvable, Histoire d'une représentation démocratique en France, Gallimard, coll. "Bibliothèque des histoires", 1998, et "Folio Histoire", 2002
  • Salas (Denis), Le Tiers pouvoir, vers une autre justice, Hachette Littérature, 1998 et coll. "Pluriel", 2000
  • Vedel (Georges), Rapport du Comité consultatif pour la révision de la constitution, La Documentation Française, 1993
  • Association française pour l’histoire de la justice, Juger les juges : du Moyen Age au Conseil supérieur de la magistrature, coll. « Histoire de la justice », Documentation française, Paris, 1999.
  • Bancaud (Alain), «Le paradoxe de la gauche française au pouvoir : développement des libertés judiciaires et continuité de la dépendance de la justice Droit et société, n° 44/454, 2000, p. 61-81.Voir le site
  • From democracy to juristocracy. The power of judges : a comparative study of court and democracy, Oxford University Press, London, 2002
  • Histoire de la justice en France, PUF, coll. "Droit fondamental", 2001
  • Normalisation d’une innovation : le Conseil supérieur de la magistrature sous la IVème République,Droit et société, n°63/64, p. 371 et ss., 2006

Découvrir également

Présentation du CSM
Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) est une institution clé de notre démocratie. Il assiste le Président de la République dans la garantie de l’indépendance des magistrats et contribue ainsi au bon fonctionnement de la justice et à la confiance que les citoyens lui accordent.
Membres du conseil
Le Conseil supérieur de la magistrature est composé de personnalités qualifiées et de magistrats désignés ou élus pour une durée de 4 ans.