Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège

Date
06/07/1992
Qualification(s) disciplinaire(s)
Manquement au devoir de probité (devoir de ne pas abuser de ses fonctions), Manquement au devoir de probité (obligation de préserver la dignité de sa charge), Manquement au devoir de probité (devoir de maintenir la confiance du justiciable envers l’institution judiciaire)
Décision
Interdiction temporaire de l'exercice des fonctions
Mots-clés
Argent
Détournement de fonds
Comptabilité
Probité
Abus des fonctions
Dignité
Institution judiciaire (confiance)
Interdiction temporaire de l'exercice des fonctions
Juge de l'application des peines
Fonction
Juge de l'application des peines
Résumé
Réalisation d’opérations financières depuis le compte d’un comité de probation et d’assistance aux libérés vers le compte personnel du magistrat qui en assurait la direction. Absence de tenue d’une comptabilité régulière fiable
Décision(s) associée(s)

Le Conseil supérieur de la magistrature, réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège, et siégeant à la Cour de cassation, sous la présidence de M. Pierre Drai, premier président de la Cour de cassation ;

Vu l’article 50 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, modifiée par la loi organique n° 92-189 du 25 février 1992 ;

Vu la dépêche du garde des sceaux, ministre de la justice, du 1er juillet 1992, proposant au Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline, d’interdire temporairement à M. X, juge de l’application des peines du tribunal de grande instance de V, l’exercice de ses fonctions ;

Après avoir entendu M. le directeur des services judiciaires et M. X en leurs observations ;

Attendu qu’il résulte du dossier soumis au Conseil :

- que M. X, juge de l’application des peines à V depuis le 15 décembre 1987, assure en cette qualité la direction du comité de probation et d’assistance aux libérés (CPAL) de cette ville ;

- que, pour le règlement de ses dépenses et l’encaissement de ses recettes, cet organisme est titulaire d’un compte courant postal au centre des chèques postaux de … ;

- que, depuis le mois de février 1990, date du décès de M. Y, délégué titulaire, qui assurait la gestion comptable et financière du comité, le compte fonctionne, sous la seule signature de M. X, qui dispose également, de manière exclusive, d’une carte de retrait de fonds ;

- qu’entre le mois d’avril 1990 et le mois de juin 1992, M. X a effectué, entre ce compte courant et ses propres comptes bancaires, plusieurs opérations qu’il n’est pas en mesure de justifier, en l’état ; qu’il n’a pu rendre compte de l’emploi des fonds à des fins conformes à leur destination ; que tout contrôle de cette gestion financière est rendu impossible par l’inexistence des registres prévus par la réglementation en vigueur et de tout document justificatif comptable ; que la tenue d’une comptabilité régulière fiable, dont l’absence totale est ainsi constatée, relevait de la responsabilité personnelle de M. X ;

Attendu que l’ensemble de ces faits, non contestés par M. X, fait obstacle au maintien du mandat à l’occasion duquel ils ont été constatés et à la poursuite des activités de ce magistrat, ce dont celui-ci convient à l’audience ;

Qu’il y a lieu, dans l’intérêt du service, de faire droit à la requête de M. le garde des sceaux, ministre de la justice ;

Par ces motifs,

Décide d’interdire temporairement à M. X l’exercice de ses fonctions ;

Dit que cette interdiction cessera de plein droit de produire ses effets si, à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, le Conseil supérieur de la magistrature n’a pas été saisi par le garde des sceaux, ministre de la justice, dans les conditions prévues à l’article 50-1 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 relative au statut de la magistrature.