Les requêtes des justiciables

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Saisine directe du CSM

 

LE DERNIER ALINÉA DE L'ARTICLE 65 DE LA CONSTITUTION énonce que le Conseil supérieur de la magistrature peut être saisi par un justiciable dans les conditions fixées par une loi organique”. La reforme constitutionnelle du 25 juillet 2008 a ainsi permis la saisine directe du Conseil supérieur de la magistrature par les justiciables. L'enjeu de cette réforme résidait dans la recherche d'un juste équilibre entre un surcroît de transparence et la nécessite d'éviter que ce dispositif ne devienne un facteur de déstabilisation de l'action des magistrats. Un système de filtrage a été institué à cette fin. Des commissions d'admission des requêtes ont été créées, compétentes pour les magistrats du siège et pour les magistrats du parquet, composées de deux magistrats et de deux personnalités extérieures désignées, chaque année, par le président de la formation.

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AFIN DE RENFORCER la confiance des citoyens dans l'institution judiciaire, la réforme constitutionnelle du 25 juillet 2008 a permis la saisine directe du Conseil supérieur de la magistrature par les justiciables. Depuis plus de 5 ans, tout justiciable peut ainsi saisir le Conseil à l'occasion d'une procédure judiciaire le concernant et lorsqu'une faute disciplinaire est susceptible d’avoir été commise par un magistrat dans l'exercice de ses fonctions.

La plainte ne peut être dirigée contre le magistrat du siège ou du parquet qui demeure saisi ou en charge de la procédure ; elle ne peut être présentée après l'expiration d'un délai d'un an suivant une décision irrévocable mettant fin à la procédure. Elle doit contenir l'indication détaillée des faits et griefs allégués, et doit être signée par le justiciable avec l'indication de son identité, son adresse ainsi que des éléments permettant d'identifier la procédure en cause.

Si la plainte est jugée recevable, la saisine du Conseil supérieur ne constitue pas une cause de récusation du magistrat. Le président de la commission d'admission des requêtes peut rejeter les plaintes manifestement infondées ou manifestement irrecevables.

Lorsque la commission d’admission des requêtes déclare la plainte recevable, elle en informe le magistrat mis en cause. La commission d’admission des requêtes sollicite du premier président de la cour d’appel ou du procureur général près la cour dont dépend le magistrat mis en cause ses observations et tous éléments d’information utiles. Le chef de cour concerné invite le magistrat à lui adresser ses observations. Dans le délai de deux mois de la demande qui lui en est faite par la commission d’admission des requêtes, il adresse l’ensemble de ces informations et observations au CSM, ainsi qu’au garde des sceaux, ministre de la Justice. La commission d’admission des requêtes peut entendre le magistrat mis en cause et, le cas échéant, le justiciable qui a introduit la demande.

Lorsqu’elle estime que les faits sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire, la commission d’admission des requêtes renvoie l’examen de la plainte au conseil de discipline des magistrats du siège ou à la formation du Conseil supérieur compétente pour la discipline des magistrats du parquet.

Le magistrat visé par la plainte, le justiciable, le chef de cour et le garde des sceaux, ministre de la Justice, sont avisés du rejet de la plainte ou de l’engagement de la procédure disciplinaire. La décision de rejet n’est susceptible d’aucun recours.

Le dépôt de la requête

Lorsque que vous estimez que le comportement adopté par le magistrat est susceptible de recevoir une qualification disciplinaire, vous pouvez saisir le Conseil supérieur de la magistrature. Cette possibilité qui vous est offerte permet de mettre en cause ce comportement. Elle n’est pas une nouvelle voie de recours. Elle ne vous permet donc pas de contester les décisions juridictionnelles elles-mêmes. Pour pouvoir être examinée, votre requête doit remplir les conditions suivantes :

  • vous devez être concerné(e) par la procédure

  • le magistrat ne doit plus être saisi de cette procédure

  • votre requête doit être présentée avant l'expiration d'un délai d’un an suivant la décision irrévocable mettant fin à la procédure.

La plainte doit contenir impérativement :

  • la date, votre identité et votre adresse, toute plainte anonyme sera rejetée

  • les éléments permettant d’identifier la procédure vous concernant,

  • l’indication détaillée des faits et griefs allégués à l’encontre du magistrat

  • votre signature

Vous devez impérativement formuler votre requête par écrit, à adresser uniquement par la voie postale au Conseil supérieur de la magistrature, 21, boulevard Haussmann 75009 Paris.

Dès l'enregistrement de votre plainte au secrétariat du Conseil, vous serez destinataire d’un accusé de réception comportant les références de votre affaire. Votre dossier sera alors examiné :

  • par une commission d’admission des requêtes composée de quatre membres de la formation du siège ou de la formation du parquet, ou

  • par le président de la commission dans le cas d’une plainte manifestement infondée ou irrecevable.

Si les conditions de recevabilité ne sont pas réunies le président de la Commission d'admission des requêtes la rejette et vous en informe par décision insusceptible de recours. Si votre plainte est déclarée recevable, la Commission procède à son examen.

L'examen au fond de la requête

Cette étape consiste à obtenir plus d'informations sur les faits à l'origine de la requête. Si votre requête a été déclarée recevable, la commission d'admission des requêtes

  1. informe le magistrat mis en cause,

  2. sollicite le chef de cour dont dépend le magistrat pour obtenir ses observations et les éléments d'information utiles,

  3. si elle le souhaite, la commission peut entendre le magistrat mis en cause ainsi que vous-même,

  4. rend sa décision

Si elle estime que votre plainte n'est pas justifiée, la Commission d'admission des requêtes rend une décision de rejet qui n'est susceptible d'aucun recours.

Si la Commission d'admission des requêtes estime que les faits sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire elle renvoie l'examen de votre plainte au conseil de discipline des magistrats du siège ou à la formation du Conseil supérieur compétente pour la discipline des magistrats du parquet.

Cette décision vous sera notifiée ainsi qu'au magistrat concerné, au chef de cour et au garde des sceaux.

Les commissions d’admission des requêtes

Dans chacune des deux formations du Conseil peuvent être constituées une ou plusieurs commissions d’admission des requêtes (CAR). Dès le mois de juillet 2011, le nombre de plaintes visant les magistrats du siège a conduit le président de la formation compétente à l’égard de ces derniers à constituer deux CAR. Si le nombre de requêtes a depuis diminué, le président de la formation compétente pour les magistrats du siège a décidé le maintien de deux CAR afin :

  • de favoriser plus de souplesse et de célérité dans le traitement des plaintes ;
  • d’éviter que, du fait des règles de déport, le filtre de la CAR ne puisse s’exercer.

Ces commissions sont composées, pour chacune des formations, de quatre membres du conseil : deux magistrats et deux personnalités qualifiées. Le quorum pour délibérer valablement est fixé à 3 sur 4. Les membres des CAR sont désignés, chaque année, par le président de la formation.

Il convient de relever que le texte ne prévoit pas de mécanisme particulier lorsque la plainte du justiciable vise indifféremment des magistrats du siège et du parquet. Ces plaintes sont alors scindées et examinées par chacune des CAR compétentes et les décisions rendues, signées par chacun des présidents des commissions ayant procédé à leur examen. Il existe donc des plaintes « mixtes » mais pas, à proprement parler, de commission « mixte ».

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FOCUS
Un regard extérieur sur l’activité des CAR

« Le CSM fait preuve d’une très grande pédagogie envers les justiciables. Lorsque ces derniers ne respectent pas les conditions élémentaires de la saisine, une lettre leur est envoyée afin qu’ils régularisent leur plainte (par exemple si la requête ne comporte pas l’adresse du plaignant ou encore si elle n’a pas été adressée par courrier au CSM ; les requêtes par email ne sont pas recevables…). De la même manière, le CSM se montre patient avec certains requérants qui le saisissent plusieurs fois dans l’année, voire plusieurs fois dans le même mois […] ».

Extraits de l’étude  
de Mme Olga Mamoudy  publiés dans le rapport d'activité du CSM pour l'année 2015  1 .

1. Mme Olga Mamoudy est maître de conférences en droit public à l’université Paris Sud XI (faculté Jean-Monnet).

 

La formalisation de la procédure devant les CAR

Les textes régissant le fonctionnement quotidien des CAR étant sommaires ou très généraux, ces dernières, au fil des ans, ont posé certains principes et répondu de manière prétorienne à certaines questions.

Les points acquis

Il existe un double principe d’étanchéité : d’une part les membres de la CAR n’ont pas accès au dossier administratif du magistrat visé par la plainte d’un justiciable ; d’autre part le travail des CAR n’est à aucun moment porté à la connaissance des autres membres du CSM dans l’exercice de leur mission concernant les nominations.

Dans le silence des textes, la précédente mandature a été amenée à définir des règles de fonctionnement qui ont été adoptées par les commissions d’admission des requêtes dans leurs nouvelles compositions.

Lorsqu’une plainte a été déclarée recevable, aucun renvoi ne peut intervenir devant la formation disciplinaire avant que le magistrat concerné ait été entendu. Il a alors accès à l’intégralité du dossier et peut être assisté de tout conseil de son choix (avocat, collègue, représentant syndical…). Ce dernier est désormais informé de la date à laquelle la commission rend sa décision. Cette audition fait l’objet d’un procès-verbal relu et signé par le magistrat entendu.

Le requérant n’ayant pas le statut de partie à la procédure, il ne reçoit communication que de la décision finale de la CAR (motivée uniquement en cas de rejet), elle-même insusceptible de recours.

Les commissions d’admission des requêtes

 

La pratique des CAR de l'actuelle mandature

La question des pouvoirs d’investigation ou de mise en état des requêtes des CAR reste posée.

Compte tenu des textes en vigueur, il paraît délicat juridiquement pour leurs membres de prendre des initiatives, y compris en suggérant au plaignant de compléter son dossier. Toutefois, pour ne prendre que cet exemple, il faut savoir que les CAR n’ont pas accès aux diverses chaînes nationales d’enregistrement des affaires civiles ou pénales, lesquelles permettent de connaître l’état d’avancement d’une procédure judiciaire et les actes intervenus au cours de son instruction.

La question des pièces protégées par le secret de l’instruction transmises au soutien d’une plainte et de la possibilité pour la personne poursuivie devant une formation disciplinaire de fournir de telles pièces en défense a aussi été posée. Le Conseil d’État a toutefois considéré qu’un agent public poursuivi disciplinairement pouvait, dans le cadre de sa défense, produire des pièces couvertes par le secret auquel il est astreint.

Il existe toujours un vide juridique en cas de partage des voix sur la recevabilité d’une plainte. Certes, si après décision de recevabilité (et après, donc, audition du magistrat concerné, recueil des observations de son chef de cour, etc.), la CAR est en partage de voix, la formation disciplinaire sera néanmoins saisie (par application du dernier alinéa de l’article 18 de la loi organique du 5 février 1994). En revanche, si, avant décision de recevabilité, les quatre membres de la CAR compétente sont en partage de voix (2 contre 2), rien n’est prévu. Les CAR ont donc décidé prétoriennement d'appliquer aux délibérations relatives à la déclaration de recevabilité des plaintes la même solution que celle prevue pour les délibérations en matière de renvoi.

Enfin, les textes applicables ne prévoient pas de suppléance pour la présidence des CAR. Certes, si au siège le président d’une des CAR ne peut siéger, l’on peut soumettre le dossier à l’autre commission, cela soulève néanmoins la question de la suppléance qui pose, en pratique, plus de difficulté juridique qu’elle n’en résout, de sorte que les CAR n'y ont plus recours.

 

FOCUS
Les plaintes des justiciables relatives aux classements sans suite

La caractéristique dominante des plaintes dirigées contre un membre du parquet tient à ce qu’elles mettent souvent en cause son inaction alléguée face à des situations que les auteurs ont portées à sa connaissance et qui justifient, selon eux, des poursuites pénales contre des tiers. L’essentiel des saisines de la CAR compétente à l’égard des magistrats du parquet (39 % en 2015) conteste donc le bien-fondé d’un classement sans suite. Certaines critiquent plus spécialement l’absence de motivation détaillée d’un tel classement. D’autres relèvent l’absence de toute information de la part du parquet quant aux suites apportées à leur plainte et soutiennent n’avoir pu exercer le droit de contester un classement sans suite devant le procureur général (ou n’avoir pas connu ce droit) .

Il est fréquent, en outre, que la mise en cause du parquet soit l’accessoire d’une contestation principalement dirigée contre un juge du siège (par exemple un juge d’instruction ou un juge aux affaires familiales).

[...] L’éventuel caractère quasi juridictionnel d’une décision de classement sans suite n’est pas, en soi, un obstacle à la recevabilité d’une plainte visant un classement même si, bien évidemment,  la  CAR compétente à  l’égard  des  magistrats  du parquet  ne  saurait  exercer un contrôle sur le fond de la motivation de la décision, notamment en l’état du principe de l’opportunité des poursuites (outre en raison de l’objet même de la procédure de plainte devant le CSM).

Extraits du rapport d'activité du CSM pour l'année 2015

 

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