1 juin 2010
Statues

L’intégrité

C.1 Le magistrat se doit d’être intègre pour se conformer à l’honneur de son état. Il présente, dans son exercice professionnel et dans sa vie personnelle, les qualités d’intégrité qui le rendent digne d’exercer sa mission, légitiment son pouvoir et assurent la confiance en la justice.

Principes

C.2 Le magistrat, par son comportement professionnel et personnel, contribue à justifier la confiance du public en l’intégrité de la magistrature.

C.3 Le magistrat fait, par sa réserve, sa vigilance et sa discrétion, la preuve de son attention à l’image de la justice.

C.4 Le principe d’intégrité induit des obligations de probité et de loyauté pour tous les magistrats.

 

La probité

Principes

C.5 La probité commande l’exercice professionnel, la conduite en société et la vie personnelle.

C.6 La probité du magistrat s’entend de l’exigence générale d’honnêteté. Elle implique le respect des dispositions légales propres aux magistrats, à leur statut et à l’organisation judiciaire.

C.7 Le magistrat se comporte avec délicatesse.

Commentaires et recommandations

NIVEAU INSTITUTIONNEL

c.8 Le magistrat exerce ses fonctions dans un cadre institutionnel qui le met à l’abri de toute atteinte à son intégrité.

L’accès à la magistrature

c.9 Lorsqu’il est appelé à intervenir dans les procédures d’accès à la magistrature, le magistrat veille à ne pas accorder des attestations de complaisance dans l’appréciation des mérites des candidats. L’administration et la gestion des juridictions

c.10 Les magistrats, dans l’exercice de leurs fonctions, respectent les normes et bonnes pratiques en vigueur relatives à l’utilisation des fonds publics et à la gestion rigoureuse du service public de la justice. Ils assurent un fonctionnement optimal de leur juridiction d’affectation en fonction des moyens mis à leur disposition dans le cadre administratif et budgétaire imparti à la mission de justice de l’État.

c.11 Les chefs de juridiction assument l’organisation, l’administration et la gestion budgé- taire des services du ressort dont ils ont la charge. Cette mission, partagée dans le cadre de la dyarchie, implique concertation et recherche de solutions communes au siège et au parquet. Chaque chef de juridiction anime celle-ci et veille à son bon fonctionnement, notamment par la répartition équilibrée des services. Il appartient aux chefs de juridiction d’assurer l’information de l’ensemble des magistrats et de susciter le dialogue.

c.12 Tout magistrat veille à ce que les moyens mis à sa disposition soient employés selon leur destination institutionnelle en évitant gaspillage, utilisation exclusive ou appropriation abusive.

c.13 Le magistrat exerce les contrôles que la loi lui confie, notamment dans la surveillance des services gérant des fonds appartenant aux justiciables ou des services en charge de conserver les biens placés sous main de justice, tels que les objets saisis.

EXERCICE FONCTIONNEL

c.14 Le magistrat consacre l’essentiel de son temps professionnel à ses fonctions judiciaires.

c.15 Certaines activités extrajudiciaires autorisées permettent une ouverture sur l’extérieur et favorisent la connaissance de l’institution. Elles doivent faire l’objet d’une dérogation individuelle accordée par les chefs de cour, être compatibles avec la dignité et l’indépendance du magistrat et ne peuvent s’exercer au détriment du service. Celles qui sont susceptibles de provoquer des conflits d’intérêt sont à proscrire.

c.16 Les travaux scientifiques, littéraires ou artistiques peuvent être réalisés sans autorisation préalable. Ils ne sauraient avoir pour effet de limiter l’activité professionnelle du magistrat.

c.17 Les justiciables sont en droit d’attendre la même intégrité dans la désignation, par les magistrats, de personnes physiques ou morales concourant à leurs missions. Le choix systématique des mêmes experts ou mandataires peut susciter un soupçon de dépendance.

c.18 L’intégrité exclut toute complaisance, tout favoritisme et toute ingérence. Le magistrat veille à préserver l’autorité judiciaire de toute influence ou pression. Il défend l’image d’une justice indépendante, impartiale et digne, en s’interdisant d’accorder quelque avantage, accommodement ou passe-droit que ce soit.

c.19 Le respect des textes et la nécessaire prudence commandent au magistrat de ne pas traiter de cas l’impliquant lui-même ou des proches, directement ou indirectement. Dès lors, il s’abstient d’intervenir, sans attendre une éventuelle récusation, dans toute procé- dure présentant ce caractère ou concernant une partie avec laquelle il entretient des liens d’amitié, de proximité ou d’inimitié.

c.20 Les textes en vigueur laissent à la libre conscience du magistrat, sans l’obliger à s’en expliquer, le choix de s’abstenir dans le traitement d’une affaire.

c.21 Le magistrat appelé à représenter la justice dans des manifestations extérieures évite les invitations susceptibles de le placer en situation délicate au regard de son intégrité.

APPROCHE PERSONNELLE

c.22 Dans sa vie privée, le magistrat reste soumis à une stricte obligation de probité qui inclut la délicatesse. Elle lui impose de faire preuve de discernement et de prudence dans la vie en société, le choix de ses relations, la conduite de ses activités personnelles et sa participation à des évènements publics.

c.23 Le magistrat ne doit, en aucune circonstance, accréditer l’idée qu’il bénéficie, ou pourrait bénéficier, d’un traitement privilégié.

c.24 Le magistrat ne peut pas faire usage de sa qualité pour obtenir, pour lui-même, ses proches ou ses relations, des faveurs ou avantages de quelque nature que ce soit. c.25 Les interventions et recommandations sont prohibées. La prudence est de règle pour la délivrance de témoignages de moralité ou attestations qui peuvent mettre en difficulté le magistrat saisi d’une procédure. Ce dernier ne doit pas se sentir tenu à une solidarité professionnelle. 

 

La loyauté

Principes

C.26 Le magistrat, conformément à son serment, exerce ses fonctions avec loyauté, et avec le souci de la dignité des personnes.

C.27 Le magistrat a un devoir de loyauté à l’égard des chefs de juridiction et de ses collè- gues. Ce devoir s’exerce dans le respect de l’indépendance juridictionnelle de chacun.

C.28 Au plan procédural, l’obligation de loyauté exige du magistrat qu’il exerce les pouvoirs que les textes lui confient et ne les outrepasse pas. Il applique loyalement les principes directeurs des procès, notamment le respect du principe de la contradiction et celui des droits de la défense. Il fonde ses décisions sur les éléments contradictoirement débattus en se gardant de tout a priori.

Commentaires et recommandations

NIVEAU INSTITUTIONNEL

La loyauté statutaire

c.29 Les règles statutaires relatives à l’organisation judiciaire, qui déterminent les rapports entre magistrats au sein des juridictions, doivent faire l’objet d’une application loyale, dans le respect des missions et responsabilités dévolues aux chefs de juridiction comme des compétences et attributions des magistrats.

c.30 Dans le respect de l’article 15 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le magistrat est tenu de justifier de ses diligences dans l’administration de la justice.

c.31 Les magistrats alertent les chefs de juridiction sur toute situation — notamment les interventions, intimidations ou menaces — susceptible d’affecter leur exercice professionnel, le fonctionnement de la juridiction et l’indépendance de l’autorité judiciaire. Les chefs de juridiction assurent aux magistrats injustement mis en cause, sans préjudice de la mise en œuvre éventuelle de la protection de l’État, un exercice serein de leur fonction.

c.32 Le magistrat du parquet met sa hiérarchie en mesure d’exercer ses compétences, en l’informant loyalement sur l’existence et l’évolution des enquêtes.

c.33 L’évaluation des magistrats, selon les règles statutaires, est un devoir des chefs de juridiction. Elle est l’occasion de faire un bilan complet de l’exercice professionnel du magistrat concerné.

La loyauté procédurale

c.34 La loyauté procédurale s’entend du respect des lois et des principes directeurs de procédure civile et pénale qui fixent les pouvoirs et les devoirs des magistrats.

EXERCICE FONCTIONNEL

La loyauté statutaire

c.35 Tout magistrat assume loyalement sa part des charges qui lui sont confiées, des contraintes et des astreintes. Les chefs de juridiction veillent au respect de cette obligation.

c.36 Les magistrats entretiennent entre eux des rapports loyaux, respectueux de leurs devoirs et de leur compétence; ils n’abdiquent pas les responsabilités que la loi leur confie. Les magistrats du siège et du parquet veillent à ce que leur appartenance à un corps unique et leur proximité fonctionnelle ne puissent se traduire par des attitudes et des comportements de nature à créer, chez le justiciable, une impression de confusion entre les missions distinctes de poursuite et de jugement.

La loyauté procédurale

c.37 Le magistrat exerce ses compétences avec efficacité, tout en se conformant loyalement, selon les fonctions exercées, à ses obligations dans la conduite des procédures, la tenue des audiences et l’élaboration des décisions. Il n’utilise pas de procédé abusif qui allonge les procédures ou diffère les décisions.

c.38 Le magistrat est, pour toutes les parties, le garant du respect de la procédure. Il exerce son autorité, sans en abuser, avec sérénité, pour mener à leur terme les procédures, en respectant le principe de la contradiction et les droits des parties. Les magistrats du siège et du ministère public se gardent de toute connivence, réelle ou apparente, avec une partie, les experts, les avocats ou tout autre auxiliaire de justice. C’est ainsi par exemple que :

– les attitudes systématiques de refus ou d’acceptation des demandes des parties sont à éviter;

– seuls les renvois justifiés doivent être acceptés;

– les mesures d’instruction utiles sont confiées à des professionnels compétents, susceptibles d’éclairer la décision à intervenir, exécutées sous le contrôle du magistrat, dans un délai et pour un coût raisonnables;

– à l’audience, les magistrats mènent les débats ou y participent, avec tact, autorité sereine et impartialité;

 – ils accordent un traitement égal à toutes les parties, accusation, défense, partie civile et avocats;

– le rapporteur doit montrer que son opinion n’est pas déjà arrêtée et que les explications des parties restent nécessaires pour fonder sa décision.

c.39 Le respect de la contradiction conduit le magistrat à refuser les informations officieuses dans les procédures qu’il traite.

c.40 Le juge conserve une entière liberté d’esprit pour élaborer sa décision. Il montre exigence et rigueur dans l’examen des preuves, pour rendre un jugement résultant d’une application loyale du droit et d’une égale considération pour les explications des parties. La motivation doit, dans tous les cas, en rendre compte.

c.41 Le magistrat du parquet, dans l’ensemble de son activité professionnelle, et notamment dans la direction des enquêtes et le contrôle de l’activité des officiers de police judiciaire, s’attache à rechercher, de manière objective, les éléments de preuve de nature à établir la vérité.