Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège

Date
20/04/2004
Qualification(s) disciplinaire(s)
Manquement aux devoirs liés à l’état de magistrat (obligation d’assumer ses fonctions), Manquement au devoir de probité (obligation de préserver la dignité de sa charge), Manquement au devoir de probité (devoir de maintenir la confiance du justiciable envers l’institution judiciaire)
Décision
Expertise médicale
Interdiction temporaire de l'exercice des fonctions
Mots-clés
Poursuites disciplinaires (mesure d'instruction)
Expertise médicale
Alcool
Incident
Image de la justice
Etat de magistrat
Fonctions
Probité
Dignité
Institution judiciaire (confiance)
Interdiction temporaire de l'exercice des fonctions
Juge d'instruction
Fonction
juge d'instruction
Résumé
État de dépendance alcoolique d’un magistrat ayant entraîné divers incidents, au sein et à l’extérieur de la juridiction, dont ont été témoins des magistrats, des fonctionnaires, des auxiliaires de justice et des tiers
Décision(s) associée(s)

Le Conseil supérieur de la magistrature réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège et siégeant, le 8 avril 2004, à la Cour de cassation ;

Vu les articles 50-2 et 51, alinéa 3, de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, modifiée par la loi organique n° 92-189 du 25 février 1992 ;

Vu la dénonciation du premier président de la cour d’appel de W du 17 septembre 2003, saisissant le conseil de discipline des magistrats du siège de faits motivant des poursuites disciplinaires contre Mlle X, juge d’instruction au tribunal de grande instance de V, et les pièces annexées ;

Mlle X ayant été informée le 2 janvier 2004 qu’elle pouvait prendre connaissance du dossier ;

Vu l’ordonnance du 4 novembre 2003 désignant en qualité de rapporteur M. Mury qui a entendu Mlle X, assistée de Me Myriam Falco-Mairat, avocat au barreau de Paris, le 3 février 2004 ;

Vu le rapport établi le 3 mars 2004 dont Mlle X a reçu copie ;

Vu la citation adressée le 8 mars 2004 à l’intéressée pour la séance du conseil de discipline à laquelle elle a comparu personnellement, assistée de Me Falco-Mairat ;

M. Patrice Davost, directeur des services judiciaires, assisté de Mme Florence Butin, magistrate à l’administration centrale du ministère de la justice, ayant été entendu ;

M. Mury ayant donné lecture de son rapport ;

Mlle X ayant été entendue en ses explications et moyens de défense sur les faits qui lui sont reprochés ;

Me Falco-Mairat ayant été entendue en sa plaidoirie ;

Mlle X ayant eu la parole en dernier ;

Attendu que le premier président de la cour d’appel de W expose dans sa dénonciation que, depuis l’année 2001, Mlle X a, au sein du tribunal de grande instance de V ou à l’extérieur de celui-ci, été à l’origine d’incidents répétés liés à sa dépendance alcoolique qui ont eu pour témoins des magistrats, des fonctionnaires, des auxiliaires de justice et des tiers ; qu’elle a, en ces occasions, donné de sa personne et de l’institution judiciaire une image dégradée ; que sans méconnaître ses difficultés personnelles, il doit être constaté qu’elle n’a pas démontré une réelle volonté de se débarrasser de son appétence alcoolique, malgré les nombreuses mises en garde qui lui ont été délivrées, les engagements solennels qu’elle a pris, l’aménagement de son service pour tenir compte de la situation, l’intervention du médecin de prévention et le suivi médical dont elle fait régulièrement l’objet depuis plusieurs années ; que son comportement persistant est constitutif d’un manquement aux devoirs de son état de magistrat et à la dignité qui y est attachée ;

Attendu qu’il résulte des pièces versées au dossier que Mlle X, qui ne conteste pas la réalité des incidents dont est saisi le Conseil et qu’elle explique par un état dépressif profond, est actuellement sous traitement médical et doit être hospitalisée à compter du 19 avril prochain ; qu’avant de décider sur la dénonciation, il y a lieu d’ordonner une expertise médicale pour déterminer la nature des troubles dont l’intéressée est atteinte et leur incidence sur les faits retenus à son encontre à titre de manquements disciplinaires ;

Que, jusqu’à la décision définitive sur les poursuites disciplinaires dont elle est l’objet, il y a lieu de lui interdire l’exercice de ses fonctions ;

Par ces motifs,

Désigne le docteur Y pour procéder à l’examen médical de Mlle X, décrire les troubles dont elle est atteinte, en déterminer les causes et dire quelle est leur incidence sur le comportement de l’intéressée retenu à titre de manquement disciplinaire ;

Impartit au docteur Y un délai jusqu’au 20 juin 2004 pour le dépôt de son rapport ;

Interdit à Mlle X l’exercice de ses fonctions au tribunal de grande instance de V jusqu’à la décision définitive sur les poursuites disciplinaires engagées contre elle ;

Dit que copie de la présente décision sera adressée au premier président de la cour d’appel de W.