Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège

Date
02/04/1999
Qualification(s) disciplinaire(s)
Manquement au devoir de probité (obligation de préserver la dignité de sa charge)
Décision
Abaissement d'échelon
Déplacement d'office
Mots-clés
Condamnation pénale
Amende
Faux (ordonnance médicale)
Probité
Dignité
Abaissement d'échelon
Déplacement d'office
Juge
Fonction
Juge au tribunal de grande instance
Résumé
Falsification d’ordonnances médicales, ayant donné lieu à condamnation pénale du magistrat
Décision(s) associée(s)

Le Conseil supérieur de la magistrature, réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège, et siégeant à la Cour de cassation, sous la présidence de M. Pierre Truche, premier président de la Cour de cassation ;

En audience publique, conformément aux dispositions de l’article 6, § 1, de la Convention européenne du 4 novembre 1950, de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu les articles 43 à 58 modifiés de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ;

Vu les articles 18 et 19 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature ;

Vu les articles 40 à 44 du décret n° 94-199 du 9 mars 1994 relatif au Conseil supérieur de la magistrature ;

Vu la dépêche de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, du 14 mai 1998, dénonçant au Conseil les faits motivant des poursuites disciplinaires à l’encontre de Mme X, juge au tribunal de grande instance de V, ainsi que les pièces jointes à cette dépêche ;

Sur le rapport de M. Henry Robert, désigné par ordonnance du 26 juin 1998, dont Mme X a reçu copie, et de la lecture duquel elle a dispensé le rapporteur ;

Après avoir entendu M. Bernard de Gouttes, directeur des services judiciaires, assisté de Mme Isabelle Douillet, magistrat à l’administration centrale du ministère de la justice ;

Après avoir entendu Mme X, assistée de Me Léon Lef Forster, avocat au barreau de Paris, en ses explications et moyens de défense, Mme X ayant eu la parole en dernier ;

Attendu que Mme X ne pouvant plus se procurer facilement un médicament anorexigène de type amphétaminique, dont elle usait depuis plusieurs années et dont elle estimait avoir besoin, a falsifié un imprimé à en-tête de l’hôpital Raymond-Poincaré de V pour fabriquer de mars 1996 à septembre 1997 de fausses ordonnances aux noms de médecins et de malades imaginaires et prescrivant ce médicament ; qu’elle a pu ainsi se procurer ce produit à plusieurs reprises mais que, dans d’autres circonstances, la vigilance des pharmaciens ne lui permit pas de parvenir à ses fins ;

Attendu que pour ces infractions aux articles 441-1 et 441-10 du code pénal, que Mme X reconnaît avoir commises, elle a été condamnée, par jugement contradictoire du tribunal correctionnel de W en date du 1er février 1999 et devenu définitif, à 5 000 francs d’amende avec exclusion de la mention de cette décision au bulletin n° 2 du casier judiciaire ; que ces faits constituent un manquement à la probité ;

Attendu, par ailleurs, que lors de la perquisition effectuée à son domicile pour découvrir les ordonnances falsifiées, furent retrouvés des revues, ouvrages, fascicules juridiques que Mme X dit avoir empruntés à la bibliothèque du palais pour rédiger ses décisions et n’avoir pu restituer à temps en raison d’un arrêt maladie ;

Mais qu’il n’est pas établi que Mme X ait voulu s’approprier ces documents ; qu’une faute disciplinaire n’est pas suffisamment qualifiée de ce chef ;

Par ces motifs,

Vu les articles 45, 2°, 45, 4°, et 46 de l’ordonnance du 22 décembre 1958,

Prononce à l’encontre de Mme X, pour les faits retenus comme constituant une faute disciplinaire, la sanction d’abaissement d’échelon assortie du déplacement d’office.