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Siège

Décision n° S254 - 05/11/2022

Retrait des fonctions

Sanction

Retrait des fonctions

Manquements

Image de la justice
Honneur - dignité
Délicatesse
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Conscience professionnelle
Probité
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Fonction

Premier vice-président

Décisions associées

Avis n° S254 CE - 14/11/2022
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Au titre des manquements constitués à l’encontre du magistrat, le Conseil a, sur le fait de n’avoir pas exercé son rôle de coordinateur alors que le magistrat était président du pôle correctionnel, souligné que le service correctionnel était certes en souffrance du fait d’un déficit structurel de fonctionnaires mais que cela n’était pas suffisant pour réduire les fonctions de coordinateur à la simple dénonciation de l’insuffisance du nombre de fonctionnaires et qu’elles visaient la mise en œuvre d’une politique d’animation et de gestion d’un service. Il est relevé que le magistrat n’élaborait pas les tableaux d’audience, les tableaux de vacation, il n’organisait que très peu des réunions de service et ne représentait que rarement le service dans des réunions organisées par le chef de juridiction. Aucun projet de service n’était élaboré, malgré des recommandations des chefs de cour notamment pour un renforcement d’un dialogue ou pour une harmonisation des pratiques de tenue d’audience. Avec ces dysfonctionnements, le président de la juridiction a été conduit à affecter le magistrat dans un autre service. Le Conseil a ainsi pu constater que les nombreuses défaillances dans l’animation et le coordination du service étaient constitutives à l’encontre du magistrat d’un manquement à son devoir de diligence au titre des responsabilités relevant de son statut de coordonnateur du service pénal. Ensuite, le Conseil a considéré qu’en raison de la répétition de plusieurs agissements tenant d’une part à l’absence de traitement dans les délais de deux demandes de permission de sortie et d’autre part à des renvois de dossiers sans aucune concertation, le magistrat a fait montre d’une désinvolture à l’égard des parties au procès et des justiciables et d’une incapacité à s’inscrire dans une collégialité, comportements préjudiciables au fonctionnement du service correctionnel, constitutifs d’un manquement aux devoirs de dignité et de délicatesse. Enfin, le Conseil a retenu un manquement au devoir de diligence et aux devoirs de l’état de magistrat pour les retards dont ce dernier a accusé dans la rédaction de ses jugements civils en considérant qu’en tant que magistrat expérimenté, il aurait dû anticiper et s’organiser pour rendre les décisions en respectant les délais. Le Conseil a noté que le manque d’investissement du magistrat était dommageable puisque il y avait eu des répercussions sur l’activité civile en augmentant la charge de travail des magistrats et des fonctionnaires de greffe. En revanche, Le Conseil a, sur l’absence d’intervention du magistrat, pourtant détenteur du pouvoir de police, à une audience correctionnelle lors de propos grossiers et outrageants prononcés par un avocat à l’encontre du ministère public, considéré que la connaissance par le chef de cour de faits susceptibles de constituer un manquement disciplinaire ne faisait pas courir le délai de prescription à l’égard du garde des Sceaux, et qu’en l’espèce celui-ci n’ayant eu connaissance des faits qu’à partir du 11 mai 2017, à savoir moins de trois ans avant la saisine de la formation disciplinaire du Conseil, il en ressortait que les faits n’étaient donc pas atteints par la prescription. Sur le fond, le Conseil a noté son absence regrettable d’intervention mais a pris en compte le contexte particulier de ladite audience ainsi que le fait que le ministère public n’ait pas engagé de poursuites contre l’avocat, pour écarter ce grief, considérant qu’il n’était pas caractérisé. Le Conseil a considéré, sur le fait d’avoir manqué à son devoir de délicatesse envers une fonctionnaire en situation de fragilité, que les faits étaient prescrits puisque le garde des Sceaux avait eu une connaissance effective de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits dès le 18 octobre 2016. La Direction des services judiciaires n’a pas soutenu ce grief à l’audience. Ensuite, sur le fait de n’avoir pas alerté le Président du tribunal d’un renvoi d’audience d’un dossier audiencé sur deux jours, le Conseil n’a pas considéré qu’il s’agissait d’un manquement au devoir de loyauté, tout en relevant néanmoins que le magistrat démontrait une nouvelle fois son manque de considération à l’égard de la collégialité et de la concertation. Le Conseil n’a pas non plus retenu le grief relatif au manquement aux devoirs de délicatesse, de dignité et l’atteinte à l’image de la Justice s’agissant du comportement du magistrat lors d’une audience qui aurait été agacé et qui aurait consulté son téléphone de manière ostensible, en relevant que cette posture n’était étayée que par le témoignage de la présidente d’audience et par aucun autre. La Direction des services judiciaires n’a pas soutenu ce grief à l’audience. Par ailleurs, le grief tenant au fait d’avoir refusé de rédiger des projets de jugement au motif qu'ils seraient signés par un magistrat inscrit après lui sur la liste de rang des magistrats du siège du tribunal judiciaire de Fort-de-France ou par un magistrat placé, a été écarté par le Conseil, au regard de l’article R212-3 du code de l’organisation judiciaire dont découle le fait que les jugements doivent être signés par le magistrat disposant du rang le plus élevé. La Direction des services judiciaires n’a pas soutenu ce grief à l’audience. Egalement, le Conseil a écarté le grief tenant au fait que le magistrat s’est adressé directement au premier président de la Cour d’appel et à son organisation syndicale, pour les saisir d’une plainte relative aux mesures, qu’il considérait comme vexatoires à son encontre, prises par le président de la juridiction au motif que les faits n’étaient pas suffisamment étayés. La Direction des services judiciaires n’a pas soutenu ce grief à l’audience. Le Conseil n’a pas retenu non plus le grief relatif aux propos déplacés tenus à l’égard de la directrice de greffe au motif que les faits n’étaient pas suffisamment étayés. La Direction des services judiciaires n’a pas soutenu ce grief à l’audience. Enfin, sur le fait d’avoir refusé initialement de rédiger une audience dans l’attente de la notification de la fiche de poste, le Conseil a considéré qu’il n’y avait pas de manquement à retenir en indiquant que les éléments de contexte, à savoir le retrait des fonctions de coordonnateur et d’une affectation au service civil, expliquaient la position du magistrat qui a pu légitimement être en attente de recevoir une fiche de poste.